RENTRÉE DES CLASSES : Jour de fête ou jour de tête ?

La Rentrée, je me souviens ! Pour moi c’était un jour d’une angoissante tristesse… L’année d’avant, j’étais dans un collège public et mixte (très important ça, pour moi, le côté mixte) avec des copains et copines que je connaissais depuis des années, et cette année-là, je me retrouvais pour de rudes et obscures raisons familiales - qu’il serait impudique et hors sujet d’évoquer ici - dans un lycée privé…

Privé de laïcité surtout puisqu’il était dirigé (en tout cas à l’époque) par des Jésuites… A la base, le Jésuite, ce n’est pas trop « Bob le boute-en-train » mais en bande et avec des fonctions éducatives et enseignantes, ça m’a vite paru être un cercle qu’aurait oublié Dante …

De mixte, mon parcours scolaire redevenait unisexe, laissant au passage ma libido naissante dans un marasme qui participait de l’angoisse citée plus haut… Et pour rajouter à mon envie d’en finir avec ce monde pourri qui me mettait d’une aussi horrible manière à l’épreuve, la condition de pensionnaire remplaçait celle de demi-pensionnaire qui m’allait jusque là comme un gant…

C’est pourtant pendant cette année que je redoutais interminable, grise et sous le signe de la crucifixion, que je rencontrai le surveillant de notre aile dans le bâtiment réfectoire/dortoir…

En général, on ne « rencontre » pas un surveillant quand on est au lycée… On le croise et on est sous son regard, mais le mot « rencontre » suggère une égalité et pour moi cette égalité confinait à la possibilité qu’aurait un tigre affamé de passer du statut de carnivore à celui de végétarien…

Et pourtant, je dois à ce surveillant qui s’occupait aussi de la bibliothèque du lycée, la découverte de Céline, Asimov, Frederic Brown et surtout celle de San Antonio qui a changé ma vision des livres et qui, je le pense sincèrement, m’a pour la première fois laissé entrevoir ou plutôt discerner vaguement ce autour de quoi pourrait tourner ma vie professionnelle… Le livre…

Du coup et avec le recul, je bénis (pour rester dans un semblant de religiosité) les circonstances qui me faisaient paraître si "no future", ce jour de rentrée… A tort, car à deviner mon avenir, j’aurais été moins triste…

San Antonio chez les jésuites ! Ç’aurait pu être un titre d’une de ses aventures… Mais c’était la mienne.

Patrick, libraire à l'Espace culturel LECLERC de FOUESNANT

La Rentrée, je me souviens... ou plutôt...les jours qui précèdent la rentrée...

Je me souviens d'un rituel, attendu chaque fin d'été : la préparation de la Rentrée ! J'y pense encore beaucoup dans mon for intérieur car j'ai inconsciemment renouvelé ce rituel avec ma fille cette année, réalisant cette perpétuation après-coup !

Comme beaucoup, je me souviens surtout des années de petite enfance. Chaque préparation de rentrée se faisait à Quimper avec l'achat de vêtements neufs pour le jour J. Le rituel se déroulait toujours de la même manière : faire les magasins de 14h00 à 16h00 puis fêter nos achats à la pâtisserie. Quel bonheur !

Et le total look était assuré de la tête au pieds !... Bien-sûr, il fallait attendre la période de la Toussaint pour le revêtir enfin le manteau neuf. Et quelle impatience pour mettre cette tenue ! Et quelle fierté ! Ce n'étaient pas juste des vêtements neufs,  mais ils marquaient le point de départ d'une nouvelle année scolaire.

Ces préparations avaient donc de belles odeurs de fin d'été et d'éclairs au chocolat...

Christelle, Leclerc de Landerneau (29)

La Rentrée, je me souviens, pour moi c'était un jour de fête, d'excitation. Pas un jour de retrouvailles, car peu d'entre nous partaient en vacances l'été. Nous avions la chance d'habiter une petite presqu'île dans le Morbihan, de 1000 habitants environ, entourée par la mer et ses plages. Et surtout, l'école, je ne la quittais pas vraiment fin juin, car un simple mur séparait notre jardin familial de la cour de récréation.

Mais j'avais juste une inquiétude le jour de la rentrée : entendre l'instituteur dire devant toute la classe qu'il avait attrapé dans ses pièges... des souris.

Et oui car je savais bien qu'elles ne pouvaient venir que de chez moi, car mes parents tenaient une boulangerie pâtisserie mitoyenne de l'école... Je devenais alors rouge pivoine de honte !

Je n'en ai jamais voulu à mon instituteur, que j'ai adoré et respecté. Je suis d'ailleurs restée en relation amicale avec lui jusqu'à la fin de ses jours. Mais ces souvenirs de rentrée ont laissé une petite trace chez moi pour la vie : une peur bleue des souris !

Muriel, Leclerc de Quimperlé (29) 

La Rentrée, je me souviens... Ma toute première journée d'école... C'est l'un de mes plus anciens souvenirs, si longtemps après je peux la décrire comme si c'était hier. D'abord une journée d'été douce comme les précédentes, un matin serein... mais avec comme un parfum de dernier jour, d'orage annoncé...

On marche dans les rues de la ville comme tant d'autres fois, Maman me tient la main. Puis un porche, une cour, des bâtiments imposants, des dames inconnues, des enfants inconnus... Maman dit quelques mots doux, et me lâche la main... L'orage sans prévenir a soudain rempli l'espace clos de cette cour d'école, je l'ai fait exploser ! J'ai hurlé ma rage aux gens, aux murs, aux arbres, au ciel, aux oiseaux ahuris, au clocher menaçant qui dominait la cour...

Un cas désespéré : personne n'a osé m'extraire du carré de sable pendant une bonne heure peut être... Puis j'ai vu Michelle, ma première amie, elle aussi calme que moi j'étais furieux : elle m'observait, je me suis apaisé. Plus tard j'ai accepté d'entrer dans la classe : les petits et les grands étaient réunis silencieux, la maîtresse parlait, racontait une histoire. Et c'est alors qu'elle nous a mis un disque... la révélation de la musique !

C'était Pierre et le Loup : les notes se sont gravées définitivement dans ma mémoire, Pierre fait 3 pas de danse, Sacha virevolte, et moi je suis devenu chat, agile et malin ! À midi j'ai bondi dehors avec les autres au milieu des cris de joie plus stridents que ceux des hirondelles ou des martinets, un carillon de cloches là-haut accompagnait notre fête, les larmes étaient dans les yeux des mères.

Yvan, Leclerc de Landivisiau (29)

La Rentrée, je me souviens, pour moi c’était un jour de grandes émotions. Mais plus encore les veilles de rentrée qui restent profondément ancrées dans ma mémoire. Agitation, appréhension, précipitation, assis restons... Je ne tenais pas en place de la journée, avant de finir prostrée un long moment dans ma chambre, épuisée par tant d’émotions, à “cliquer” sur la pression de la grosse poche plate de mon cartable neuf, rongeant quelques ongles provocateurs au passage. J’aimais ce joyeux maelström de sentiments qui m’envahissait la tête et le cœur, indicateur d’une excitation qui allait me tenir éveillée jusque tard dans la soirée. Je me souviens des vêtements neufs et des chaussures cirées qui attendaient cette date de rentrée pour enfin être étrennés. Quelle que soit la température ou la météo du jour, il était inconcevable de changer un “dress code” arrêté depuis des semaines.

Et là, ma sœur et moi étions tellement impatientes et soucieuses d’être à l’heure le lendemain matin, que nous avions mis en place un stratagème qui a tenu presque toute notre Primaire, avant que nous ne soyons prises finalement en flagrant délit. Dès que notre mère fermait la porte de notre chambre sur le dernier “bonsoir”, nous nous relevions et, à tâtons dans le noir pour ne pas éveiller les soupçons de notre activité clandestine, nous revêtions en toute hâte la panoplie de notre Rentrée, soigneusement préparée sur le dossier de notre chaise. Et c’est ainsi, engoncées dans nos cols roulés en acrylique, nos jeans neufs encore trop rigides et nos sur-pulls aux motifs écossais, que nous finissions par tomber de sommeil... et peut-être un peu aussi, à cause de la torpeur provoquée par notre équipement de nuit !

Cécile de Saint-Brieuc (22)