AGRICULTURE

Un cochon de caractère

Les producteurs de porc subissent une crise lourde, accentuée par l’explosion du prix des céréales, dont la longueur risque de condamner nombre d’entre eux. Les producteurs bretons sont nos voisins, nos amis, parfois notre famille mais aussi nos clients. Nous aimerions qu’ils vivent mieux de leur métier. Pour que chacun puisse se forger une opinion, il est essentiel de recouper les informations, d’entendre la voix de chacun et d’élever le débat vers une réflexion constructive plutôt que sensationnelle. Ce qu’il faut savoir…

Il est primordial de rappeler que le prix du porc n’est pas fixé par la grande distribution mais par la confrontation de l’offre et de la demande au Cadran, le marché du porc Breton de Plérin.


Philippe Chalmin, économiste de renom et Président de l’Observatoire des prix et des marges a été commandité par le gouvernement pour évaluer la répartition de la valeur ajoutée au sein de la filière viande. Son rapport du 6 janvier 2011 a dédouané officiellement les industriels et distributeurs d’avoir gonflé leurs marges, au grand dam de la FNSEA, comme en témoignait une dépêche AFP du 12 janvier 2011, "déçue" par ce rapport d’enquête.

 

Les centres E. Leclerc qui sont membres fondateurs de la marque Le Cochon de Bretagne payent depuis une dizaine d’années un complément de prix d’environ 2 millions d’euros par an aux producteurs adhérents. Cette plus-value correspond à une valorisation de la qualité mais est encore loin de compenser les pertes des producteurs. Toutes les réflexions visant à augmenter cette plus-value et à la faire payer par l’ensemble de la distribution se heurtent à la loi française ou européenne, qui interdit ce genre de procédé considéré comme une "entente". Quant au fameux partage de la "valeur-ajoutée", cher aux hommes politiques et aux leaders syndicalistes, il n’y a plus qu’en Corée du Nord et à Cuba qu’on peut encore décider de partager avec son client ou son fournisseur. Dans l’économie libérale, on fixe son prix en cohérence ou en confrontation avec celui des concurrents. Leclerc en France avec Carrefour ou Intermarché, les producteurs de porc français avec les producteurs de porcs allemands, les producteurs de lait bretons avec leurs concurrents néo-zélandais.

 

Alexis Gourvennec (fondateur de Sica de St Pol de Léon) un jour disait : "Les meilleurs producteurs de porcs bretons sont techniquement les meilleurs du monde". Le problème est qu’on leur fait faire la course contre leurs collègues allemands avec des semelles de plomb. Les éleveurs bretons souffrent de distorsion de concurrence en terme de coûts sociaux et fiscaux.

 

On peut d’ailleurs s’étonner de l’indifférence du syndicalisme agricole vis-à-vis des enseignes comme LIDL qui vendent eux beaucoup de porc importé d'Allemagne. Leclerc a un abattoir en Bretagne, Kermené, dont le cahier des charges stipule qu’il ne traite que du porc breton. Ce qui permet au Cochon de Bretagne d’être vendu dans toute la France. Les producteurs de porc ont souhaité que nos fournisseurs de marques nationales en fassent de même, afin d’augmenter la consommation de porc français. C’était une très bonne idée. Nous avons donc écrit à l’ensemble de nos fournisseurs pour exiger que leurs produits soient VPF (viande de porc française). La plupart nous ont suivis, mais quelques multinationales n’ont pas été sensibles à la pression. Il faut dire que nous ne représentons qu’1 ou 2 % de leur chiffre d’affaire avec un consommateur qui plébiscite leurs produits. Les Etats-Unis eux-mêmes avait tenté d’obtenir de l’une de ces multinationales de stopper les achats de café et de cacao en Côtes d’Ivoire. Elles n’en ont rien fait. Alors, si l'on est capable de résister à Obama, Leclerc...

 

Pourtant en ce jour de blocage du Centre Leclerc de Lannion le samedi 5 mars 2013, les producteurs de viande présents ont permis à LIDL de vendre un peu plus de viande porcine venue d’Allemagne. Non seulement ils privilégiaient ces magasins face à la fermeture contrainte du Leclerc, mais en plus ils bloquaient au péage de La Gravelle, les camions de Kermené qui livraient du porc breton à tous les magasins Leclerc de la région parisienne ! (Une partie de la marchandise a d'ailleurs été détruite !). Il est difficile de comprendre une logique qui consiste à se tirer une balle dans le pied tout en pleurant parce que ça fait mal…

Il ne ressortira rien de positif des manifestations de violence vis-à-vis de la distribution, surtout dirigées contre un adhérent Leclerc qui a passé sa vie à défendre sa région au travers notamment de Produit en Bretagne et ses 30 000 emplois créés en Bretagne.

 

Les Centres E. Leclerc de Bretagne et leurs collaborateurs sont fiers de leur métier et de leurs actions. Ils ont participé activement au développement de leur région, en étant entre autres les ambassadeurs des PME et des producteurs bretons dans toute la France.

Différentes voies existent pour sortir les producteurs de porc de l’ornière :

- Une réforme fiscale et sociale permettant une égalité des chances par rapport aux Allemands

- Suivre la proposition de Xavier Beulin, le nouveau président de la FNSEA qui est aussi président du céréalier Sofiprotéol (Lesieur) : "Créer des marques comme dans la filière oléagineuse pour que la valeur ajoutée profite aux producteurs" (source : LSA du 10 février 2011).

C’est aussi l’idée que défendent les Centres Leclerc de Bretagne.

 

Écrire commentaire

Commentaires: 0